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Megworld

Tigre, Tigre ! Margaux Fragoso

Megworld

http://rentreelitteraire-flammarion.com/images/Couvertures/margaux-fragoso-tigre-tigre.jpg

Flammarion - 22 août 2012 - 407 pages - 21 euros

 

Je remercie Price Minister pour cette opération des Matchs de la rentrée littéraire et la réception de ce roman. 

 

Résumé de l'éditeur :

 

Par une belle journée d'été, Margaux Fragoso rencontre Peter Curran à la piscine de son quartier, et ils commencent à jouer. Elle a sept ans; il en a cinquante et un. Quand Peter l'invite chez lui avec sa mère, la petite fille découvre un paradis pour enfant composé d'animaux exotiques et de jeux. Peter endosse alors progressivement, insidieusement, le rôle d'ami, puis de père, et d'amant. Charmeur et manipulateur, Peter s'insinue dans tous les aspects de la vie de Margaux, et transforme l'enfant affectueuse et vive en une adolescente torturée. Lyrique, profond et d'une limpidité hypnotique, Tigre, tigre ! dépeint d'une manière saisissante les forces opposées de l'emprise et de la mémoire, de l'aveu et du déni, et questionne nos capacités de guérison. Un récit extraordinaire qui dévoile de l'intérieur la pensée d'une jeune fille au bord de la chute libre.

 

L'avis de Damien :

 

« Tigre, Tigre ! » n’est pas un roman, c’est un témoignage. Celui d’une petite fille de sept ans qui rencontre un homme gentil et amusant qui devient son ami. Celui d’une adolescente totalement dépendante de Peter, l’homme qui l’opprime. Enfin, celui d’une jeune femme qui progressivement va s’écarter pour prendre un nouveau départ.


Ce livre est dérangeant à plusieurs égards. D’abord, par le thème de la pédophilie qui n’est jamais facile à traiter. L’auteure est le personnage principal de cette histoire qui est la sienne. Elle ne cache rien au lecteur, elle ne tente pas de justifier sa conduite ou celle de Peter. Elle décrit, le plus objectivement possible sa vie, ses sentiments. A sept ans elle nous parle du monde fantastique dans lequel vit Peter avec ses animaux et sa maison qui semble être un magnifique terrain de jeu. A 12 ans, son vocabulaire a changé, le style est moins enfantin, son regard sur le monde qui l’entoure est moins rose, ses relations avec Peter sont plus charnelles. A 20 ans, Peter n’est plus qu’une habitude, un vieillard rassurant pour une femme qui a passé toute sa vie ou presque à ses cotés. Les descriptions des différents stades sont précises, sans fard. Comment il gagne la confiance de sa mère, manipule Margaux, lui demande des faveurs sexuelles la poussant inconsciemment à l’autodestruction. On ne cherche pas à épargner le lecteur, on le met face à la réalité.


Ce qui m’a vraiment marqué est que, paradoxalement, cette relation destructrice et malsaine a dans un premier temps permis à une petite fille de survivre.  La famille de Margaux est détruite : son père est un alcoolique infidèle qui regrette de s’être marié à une femme souffrant de schizophrénie et dont l’état ne cesse de s’aggraver. Peter s’impose alors comme un être protecteur, une personne de confiance qui compense le manque affectif. Sans lui, on sent que Margaux aurait eu du mal à survivre. Elle n’a alors pas conscience de ce qu’est la sexualité, de ce que Peter lui demande réellement, il est une bouée de sauvetage. Dans un second temps, il devient à la fois un fardeau et une échappatoire. Un fardeau dans le sens où sa présence ne permet pas à Margaux de se développer normalement, de s’intégrer dans la société. Cette période est la plus sombre du livre : l’adolescente s’accroche de plus en plus fort à un plan de vie avec Peter qui est de moins en moins réalisable. Elle finit alors par toucher le fond pour mieux rebondir. Alors que le temps qui coule marque de plus en plus en plus Peter, celui-ci relâche progressivement son étreinte permettant ainsi à sa victime d’intégrer la société qu’ils fuyaient. Lorsqu’il meurt elle a 22 ans et peut vivre sans lui.

 

Au final, l’évolution de leur relation lui a permis de s’en sortir. Cependant on ne peut qu’imaginer ce que serait devenue la vie de Margaux si Peter avait été arrêté alors qu’elle était enfant ou adolescente : aurait-elle pu remonter la pente ? On en doute. Le retour à une vie normale s’est fait en douceur ce qui est rarement le cas. On imagine alors sans peine les effets dévastateurs d’une telle relation sur le développement de l’enfant.


Pour terminer, on peut s’interroger sur le fait que personne n’ait véritablement donné l’alerte : les parents de Margaux, la concubine de Peter, les deux enfants de celle-ci… Autant de témoins privilégiés qui restent muets et dont on ne saura jamais s’ils avaient compris ou non quelle était la nature des relations entre le pédophile et sa proie. 

 

Je conseille vivement ce livre aux lecteurs n’ayant pas peur d’être confrontés à la dure réalité de la pédophilie.


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